Dossier élaboré par François Leng, archéologue, sur la base de son Inventaire des fontaines et lavoirs du Jura - 03 2017
La maîtrise de l'approvisionnement en eau
Avant que l’eau n’arrive au robinet de chaque foyer, les fontaines publiques étaient, avec les sources, les puits les cours d’eau et les citernes, les seuls moyens d’alimentation en eau potable. Elles répondent à un besoin élémentaire de l'homme.
L’eau, indispensable à la vie, est nécessaire à de nombreuses activités. De tout temps, les hommes ont cherché à maîtriser leur approvisionnement en eau pour se prémunir des sécheresses, bénéficier de l’eau la plus pure possible et réduire les distances entre le point d’eau et le lieu d’utilisation.
Dans la plupart des villages de notre région, les sources, nombreuses et abondantes ont été maîtrisées par d'importants travaux de captage et de conduite ; ce qui a rendu possible la construction de fontaines.
Nous nous intéressons à l'eau captée, canalisée, domestiquée, mise à disposition de la population par l'intermédiaire d'installations simples ou de fontaines qui ne peuvent pas, dans leur grande majorité, être considérées comme des œuvres d'art.
Illustr. Abergement-le-Grand (39) : Lavoir ouvert avec captage de source
La création des lavoirs résulte des principes élémentaires d’hygiène et de la prise de conscience collective de l’importance de la salubrité publique. Choléra, variole et typhoïde meurtrissent le XIXe siècle. De 1826 à 1837, une épidémie de choléra fait 600.000 morts en France. L’attitude face aux épidémies diffère totalement de celle des siècles précédents : elles ne sont plus vécues comme des punitions du ciel et, plutôt que de s’incliner devant la fatalité, la raison commande de prévenir leur apparition.
L’eau devient l’objet d’une attention accrue. Que ce liquide puisse propager des maladies est désormais prouvé. Veiller à sa pureté devient un impératif. Or la cause principale de son insalubrité réside en ce qu’un même point d’eau sert à de multiples usages, hommes et animaux l'utilisent indifféremment. Les femmes vont laver leur linge à la rivière, à la fontaine ou à la mare communale. Les inconvénients sont évidents : les habitants qui viennent s’approvisionner à la mare ou à la fontaine pour leurs tâches domestiques n’y trouvent qu’une eau souillée par les savons et les saletés.
Tout cela favorisait la propagation des maladies et Il apparaît nécessaire de supprimer au plus vite ces foyers d’infection.
Les élus de la nation décidèrent « que les communes sont tenues de garantir aux habitants de bonnes conditions de salubrité, c'est à elles qu'incombe la charge de concrétiser les équipements nécessaires ». Il s'agissait là d'un geste politique majeur prouvant que l'Etat prenait en égale considération tous les citoyens, même au plus profond des zones rurales. Au cours du XIXe siècle d'autres textes de loi vinrent compléter ces mesures.
En plus de l’amélioration de la salubrité publique, les lavoirs apporteront un progrès de l’hygiène individuelle. La propreté du corps devient un impératif et celle du vêtement l’est tout autant. Les épidémies ont appris que le linge peut véhiculer des germes malsains.
Illustr. Marigna (39) : Avertissement gravé sur le fût de la fontaine du lavoir
Depuis la fin du XIXe siècle, le principe de changement du linge de corps une fois par semaine était une règle assez générale. Il avait lieu le dimanche et faisait partie d'un rituel vestimentaire lié à la fréquentation de l'église pour assister à la messe. Pour le linge de ménage, les situations étaient très variables selon les familles et les milieux.
Le nettoyage approfondi du linge qui est mis à bouillir constitue un moyen efficace de lutte contre les épidémies et les risques d’infections.
Illustr Chaux-du-Dombief (39) : Peinture illustrant le petit lavoir |